2 règles sont communes à tous les biens publics :

  1. Le principe d'insaisissabilité des biens publics ; et
  2. Le principe d'interdiction des cessions à vil prix des biens publics.

Section 1 : Le principe d’insaisissabilité des biens publics

Les biens publics sont insaisissables. Cela signifie que le juge ne peut pas ordonner leur saisie par voie d'exécution.

Si une personne publique ne paie pas ses dettes, son ou ses créanciers ne peuvent pas obtenir du juge que celui-ci ordonne la saisie et la vente de ses biens. Autrement dit, si une personne publique ne paie pas ses dettes, bien qu'elle détienne des biens qui pourraient correspondre à la valeur de ce qu'elle doit, le créancier ne peut pas obtenir la saisie de ces biens.

Tous les biens publics sont insaisissables : les éléments du domaine public comme les éléments du domaine privé.

Ce principe n'a pas valeur constitutionnelle : il n’a qu'une valeur législative, ce qui signifie que le législateur peut y déroger. Il convient d’en étudier les limites et les conséquences.

La CJUE a jugé que l'existence du principe d'insaisissabilité du bien public constitue pour les personnes publiques un avantage que l'on peut qualifier "d'aide d'État". Le droit européen a pour objectif de constituer un grand marché européen dans lequel toutes les entreprises doivent être à égalité, ce qui passe par l'interdiction pour les États membres de les aider grâce à des aides financières.

Ainsi, pour la CJUE, lorsque l'État français fait bénéficier les entreprises publiques françaises du principe d'insaisissabilité des biens publics, il les met à l'abri de leurs créanciers. Elles peuvent alors contracter des dettes sans avoir à toujours les honorer et elles se trouvent donc d'une certaine manière favorisées par ce principe d'insaisissabilité des biens publics.

Les EPIC en bénéficient, suivant une décision SNCF rendue par la CJUE le 19 septembre 2018 (la SNCF a depuis changé de statut). → Au nom de la libre concurrence, la CJUE critique le principe d'insaisissabilité des biens publics.

Ce principe a été inventé au 20ème siècle pour protéger les biens publics au motif qu'ils sont utiles à l'intérêt général.

La CEDH a aussi condamné le principe d'insaisissabilité des biens publics, mais pour une autre raison. En effet, la CEDH ne protège pas le marché, elle ne vise qu'à garantir les libertés fondamentales des personnes privées. Elle considère que le principe d’insaisissabilité viole :

En droit français, le principe d'insaisissabilité des biens publics a d'autres conséquences que la seule interdiction pour le juge judicaire d'en ordonner la saisie. Ce principe interdit aussi aux personnes publiques d'hypothéquer leurs biens publics.

L’hypothèque est un mécanisme permettant de garantir des prêts accordés au propriétaire d'un bien. Le propriétaire accepte d'accorder une hypothèque à l'organisme qui lui prête de l'argent. Cette hypothèque est un droit réel qui grève le bien → elle suit le bien même s'il est vendu par son propriétaire. Si l'emprunteur ne rembourse pas, le titulaire de l'hypothèque va pouvoir obtenir la saisie du bien afin que celui-ci soit vendu ; il se fait ensuite rembourser ce qui lui était dû grâce au produit de la vente.

L'hypothèque repose sur l'éventualité d'une saisie du bien si le propriétaire ne rembourse pas l'emprunt. Puisque les biens publics sont insaisissables, ils ne peuvent pas être hypothéqués.

Ainsi, le principe d'insaisissabilité des biens publics interdit la constitution d'hypothèques sur le domaine : aussi bien des hypothèques conventionnelles - qui résultent de contrats, consenties par le propriétaire - que des hypothèques légales - attachées à un régime juridique défini par le législateur.

Conseil d'État, 2020, Association syndicale des propriétaires de la cité Boigues : Dans cette affaire, il fallait déterminer le régime applicable à des équipements publics appartenant à la commune de Clamart et se trouvant dans le périmètre d'une association syndicale de propriétaires (dont faisait partie la commune de Clamart en tant que propriétaires parmi d'autres).