Le régime de responsabilité du fait des dommages de travaux publics ou d’ouvrages publics sont très favorables à la victime, parce que le Conseil d’État a fait le choix, dès le 19ème siècle, de protéger autant les travaux que les administrés. La victime est donc mieux protégée d'un dommage causé par un ouvrage public ou d'un travail public que d'un ouvrage ou travail privé. Idée : il ne faut pas que la victime soit sacrifiée sur l'autel de l'intérêt général.

Section 1 : Les types de dommages

Un ouvrage public peut être mal entretenu et causer un dommage. L'entretien d'un ouvrage public consiste en des travaux publics, qui vont transformer l'ouvrage et répondre à la définition donnée par la jurisprudence Monségur.

Conseil d’État, 2005, Courson : Sieur Courson, agriculteur qui exploite des terrains le long d'une voie ferrée ; plein de lapins avaient proliféré dans les talus autour de la voie ferrée ; ces talus étaient un ouvrage public qui avaient causé un dommage à M. Courson, qui se plaignait de l'absence d'entretien de cet ouvrage.

L'existence même d'un ouvrage public peut engendrer un dommage. L'ouvrage public peut être implanté de manière régulière et fonctionner sans défauts, et pourtant, par son existence même, provoquer des nuisances. Par exemple, les gens qui habitent à proximité de piscines se plaignent fréquemment du taux d'humidité ou des odeurs générées par la piscine.

Arrêt de principe en la matière : Conseil d’État, 1906, Sieur Bichambis : À Paris, M. Bichambis vivait juste à côté de latrines publiques, qui fonctionnaient normalement. Il avait droit à une indemnité qui ressemble à celle que reconnaîtra plus tard le juge judiciaire pour trouble anormal de jouissance.

Section 2 : Le contentieux de la responsabilité

Depuis la loi du 28 pluviôse an 8, le juge de droit commun pour les dommages causés par les travaux publics est le juge administratif.

Toutefois, dans certaines circonstances, le juge judiciaire est compétent : il applique le régime de responsabilité de droit civil tel que défini par le Code civil :

§ 1. Exception n°1, qui concerne les ouvrages publics

Lorsque la victime de l'ouvrage public est en même temps un usager du SPIC auquel est affecté l'ouvrage public à l'origine du dommage au moment de celui-ci, alors le juge judiciaire est compétent, parce que s'applique la règle selon laquelle la responsabilité contractuelle prévaut sur la responsabilité délictuelle.

La responsabilité du fait des travaux publics est une responsabilité délictuelle ; en revanche, la responsabilité des dommages causés par un SPIC à un usager est une responsabilité contractuelle car, en vertu de la jurisprudence Bac d'Eloka (1921) du Tribunal des conflits, les relations entre un SPIC et ses usagers sont considérées comme des relations contractuelles de droit privé.

Exemple : Conseil d'État, 1967, Demoiselle Labat : Les faits s'étaient déroulés lors des commémorations du centenaire de l'inauguration par Napoléon 3 de la gare de Bigorre. La population était venue en masse afin de voir les spectacles organisés, et une partie d'entre elles était montée sur la verrière de la gare, qui n'était pas conçue pour supporter la présence d'un grand nombre de personnes. Sous le poids des spectateurs, la verrière s'est effondrée, et la chute et le bris du verre ont causé des difficultés. Dame Labat, victime de cet accident, cherche à engager la responsabilité de l'administration. L'ouvrage est un ouvrage public, puisqu'il appartient à une personne publique et affecté à un but d'intérêt général. À priori, le juge administratif est compétent puisqu'au moment du dommage, la victime utilisait le bien. Mais quel était le statut de Dame Labat vis-à-vis de la SNCF, qui gère un SPIC ? Pour répondre à cette question, il faut déterminer si la victime est un usager du SPIC ou un tiers à ce SPIC.

En l'espèce, la victime n'était pas là pour prendre le train, mais pour assister à un spectacle qui n'avait pas de rapport avec la prestation de la SNCF → Mme. Labat était un tiers au SPIC. C'est donc le juge administratif qui est compétent.

Exemple : Conseil d'État, 1990, Demoiselle Declerck : Mme. Declerck avait subi un accident en traversant un passage à niveau en le traversant à vélo, parce que le passage à niveau était mal conçu. Qui est le juge compétent ? Mme. Declerck était un usager de la route traversant la voie ferrée → le juge administratif est compétent.

Exemple en cas d'accident pendant les sports d'hiver : Si un enfant tombe d'un télésiège, le juge compétent est le juge judiciaire, parce que lorsque l'enfant subit un dommage, il est usager du SPIC des remontées mécaniques.

§ 2. Exception n°2, qui concerne les travaux publics

La loi du 31 décembre 1957 a également reconnu la compétence exclusive du juge judiciaire pour connaître des dommages causés par un véhicule. Dès lors qu'un dommage est causé par un véhicule, l'action en responsabilité de la victime relève du juge judiciaire, même lorsque le véhicule en question concourt à l'exécution d'un travail public.

Un véhicule est un engin qui se meut par sa propre force → conception extensive du véhicule : voiture, camion, train, aéronef, bateau… Grâce à cette conception extensive, le juge judiciaire connaît d'un très large contentieux.

Si le véhicule qui a causé le dommage participait à l'exécution d'une mission de service public au moment où le dommage a été causé, alors la victime doit saisir le juge judiciaire.