Les domaines publics immobiliers par détermination de la loi :

soit dérogent à la définition de l'article L2111-1 ; soit dérogent au régime public de droit commun.

Souvent, les domaines publics par détermination de la loi font l'objet d'un régime spécial. Comme ils font l'objet d'un régime spécifique, il faut définir le champ d'application de ce régime, en connaissant la définition de la notion.

Nous allons ainsi étudier dans ce chapitre les définitions des différents domaines publics par détermination de la loi ; nous aborderons aussi quelques éléments de leur régime. Nous nous intéresserons aux :

Section 1 : Le domaine public maritime

On distingue :

  1. Le domaine public maritime naturel ;
  2. Le domaine public maritime artificiel (qui contient majoritairement les ports).

§ 1. Le domaine public maritime naturel : un domaine non affecté

L’article L2111-4 du CGPPP dispose : ”Le domaine public maritime naturel de l’État comprend : 1° Le sol et le sous-sol de la mer entre la limite extérieure de la mer territoriale et, côté terre, le rivage de la mer. Le rivage de la mer est constitué par tout ce qu'elle couvre et découvre jusqu'où les plus hautes mers peuvent s'étendre en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles ; 2° Le sol et le sous-sol des étangs salés en communication directe, naturelle et permanente avec la mer ; 3° Les lais et relais de la mer : a) Qui faisaient partie du domaine privé de l'Etat à la date du 1er décembre 1963, sous réserve des droits des tiers ; b) Constitués à compter du 1er décembre 1963. […] 5° Les terrains réservés en vue de la satisfaction des besoins d'intérêt public d'ordre maritime, balnéaire ou touristique et qui ont été acquis par l'Etat. Les terrains soustraits artificiellement à l'action du flot demeurent compris dans le domaine public maritime naturel sous réserve des dispositions contraires d'actes de concession translatifs de propriété légalement pris et régulièrement exécutés.”

Ce domaine public maritime (DPM) naturel appartient exclusivement à l'État. Ce qui le caractérise, c'est son absence d'affectation : ce domaine public se compose d'une liste de biens énumérés de manière exhaustive à l'article L2111-4 et il n’est jamais question d'affectation.

Définition du rivage donnée par le Conseil d’État :

Jusqu’en 1973, le CE appliquait 2 définitions du rivage :

1 définition pour le rivage méditerranéen, qui datait du Code justinien ; 1 définition pour le rivage Atlantique, issue du Code de la marine de Colbert.

Conseil d’État, 1973, Kreitmann : Le Conseil d’État harmonise sa définition : "Le rivage de la mer est constitué par tout ce qu'elle couvre et découvre jusqu'où les plus hautes mers peuvent s'étendre en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles". Cela signifie que, dès lors qu'un terrain est mouillé par les flots de la mer de façon régulière (même annuelle !), ce terrain devient un élément du rivage et donc devient un élément du domaine public maritime naturel → il devient propriété de l'État.

Conseil d’État, 2017, Société immobilière APS : Le Conseil d’État prévoit une indemnisation quand le propriétaire subit un dommage grave, anormal et spécial ; mais comme le niveau de la mer augmente partout, tous les propriétaires en bord de mer vont être affectés.

Conseil constitutionnel, 2013, SCI Pascal (QPC) : Saisi de la conformité à la Constitution de l'article L2111-4, le Conseil constitutionnel dit qu’il n’y a aucun problème : les propriétaires ne sont pas expropriés par l'État, mais par la nature. Toutefois, selon le professeur Norbert Foulquier, il y a bel et bien expropriation sans indemnisation.

Les étangs salés font partie du domaine public maritime quand ils sont "en communication directe, naturelle et permanente avec la mer". Cour de cassation (Assemblée), 1972, Étang Napoléon : Quand l'étang salé cesse de l'être, il retourne dans le patrimoine des personnes qui le possédaient avant que cet étang ne soit salé et devienne donc propriété de l'État. → Dérogation au caractère perpétuel du droit de propriété ! Il n’est cependant pas certain que cette jurisprudence soit encore valable aujourd'hui.

L’article L2111-4 évoque aussi les lais et relais de la mer : ce sont des terrains qui ont été recouverts par les flots par le passé et qui ne le sont plus aujourd'hui = terrains dont la mer s'est retirée. En 1963, le législateur est intervenu pour dire que tous les lais et relais qui se constitueraient après 1963 font automatiquement partie du domaine public ; en revanche, les lais et relais constitués avant 1963 ne font partie du domaine public que si l'administration les a classés dans le domaine public maritime.

Les cinquante pas géométriques (on parlait auparavant de "cinquante pas du roi") sont un bande de terrain le long du rivage se trouvant en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane et à la Réunion. Elle mesure 81,20 mètres. Cette zone fait également partie du domaine public maritime naturel de l'État. Son origine historique est peu claire : elle permettait peut-être de lutter contre les pirates ? aux marins de reconstruire leurs bateaux avec du bois ? d’héberger des esclaves ?