Section 1 : Le déroulement normal de la procédure d’instruction

Les textes et la pratique ménagent une souplesse au profit du requérant, qui peut présenter sa requête en 2 temps : d'abord une requête sommaire, puis un mémoire complémentaire. L'avantage de cette scission en 2 temps est d'accroître le temps laissé au requérant pour peaufiner son argumentaire.

On ne l'oblige pas, dans le délai de 2 mois, à "tout mettre sur la table", mais simplement à avancer les moyens de légalité externes et internes lui permettant de ne pas se retrouver bloqué par la jurisprudence Intercopie (1953).

Néanmoins, cela est encadré.

Devant le Conseil d’État, une fois que le requérant a produit sa requête sommaire, il dispose d'un délai de 3 mois pour présenter son mémoire complémentaire. S'il ne l'a pas fait dans un délai de 3 mois, il est réputé s'être désisté de sa requête. Cela laisse quand même 5 mois au requérant pour développer son argumentaire !

Il arrive qu'un avocat au Conseil d’État ne produise pas le mémoire complémentaire dans les 3 mois, mais ça n'est jamais par étourderie : c’est parce que, pour une raison ou pour une autre, le client décide de ne pas donner suite à sa requête.

Devant le TA ou le CAA, ça n'est pas automatique. Une fois que la requête sommaire a été déposée, le requérant dispose d'un délai fixé par le juridiction pour présenter sa requête complémentaire. S’il ne respecte pas ce délai, il sera mis en demeure. C'est uniquement s'il n'a toujours pas produit son mémoire complémentaire après mise en demeure qu'il est réputé s'être désisté d'office (article R612-5 du CJA).

Cela reste assez rare.

<aside> 💡 Ça n'est qu'une faculté laissée au demandeur : s’il souhaite que l'affaire soit jugée rapidement, il peut produire son mémoire complet dans le délai de 2 mois.

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Ensuite, la production du mémoire en défense prend du temps. En effet, la plupart du temps, le défendeur est l'administration, qui est souvent mal outillée pour réagir rapidement aux requêtes dont elle est saisie : elle n'a pas toujours les moyens humains, matériels… pour se défendre rapidement.

En règle générale, sauf cas particulier, le délai donné au défendeur est de 2 mois ; mais lorsqu'une affaire présente un certain degré d'urgence, ce délai peut être réduit.

Souvent, au bout de 2 mois, le défendeur n'a rien produit. Le juge est alors dans une situation difficile : il est difficile de statuer sur une requête sans les arguments du défendeur. Pour lever cet obstacle, la juridiction peut adresser au défendeur une mise en demeure de produire son mémoire en défense.

L'intérêt de cette mise en demeure est simple : si, malgré cette mise en demeure, le défendeur n'a pas produit son mémoire, il sera réputé avoir acquiescé aux faits, c'est-à-dire avoir accepté les faits tels qu'ils sont présentés par le requérant. Cela peut être un vrai problème pour le défendeur. Limite : il ne faut pas que les faits tels qu'ils sont présentés par le requérant soient contredits par les pièces du dossier.

Par ailleurs, le défendeur peut toujours produire son mémoire en défense, même 6 mois après l'expiration de la mise en demeure. Le juge sera tenu de le prendre en compte si l'instruction est toujours en cours et il n'y aura alors pas d'acquiescement au fait.

Section 2 : Les instruments dont dispose le juge pour aller plus vite

Malgré tout, il peut arriver que le procès administratif soit mené avec un tempo qui risque de déboucher sur des délais extrêmement longs. Le procès administratif qui s'éternise finira par dépasser le délai raisonnable de jugement, ce qui engagera la responsabilité de l'État. Le juge a donc été doté de nouveaux outils permettant d'accélérer le déroulement du procès administratif.

Lorsque la juridiction identifie dès le départ une affaire comme devant être jugée rapidement, elle peut, dès le moment où la requête est introduite, fixer la date à laquelle l'instruction sera close → les parties sont informées dès le départ de la durée prévue pour l'instruction.

Il y a des mécanismes qui permettent à la juridiction, pendant le déroulement de l'instruction, de dire aux parties que si elle n'a pas reçu un mémoire à partir d'une certaine date, l'instruction pourra être close à tout moment par une ordonnance. Ce dispositif a une faiblesse : si un mémoire est produit la veille de la date retenue pour la clôture de l'instruction, la partie aura respecté la mise en demeure qui lui a été adressée. Problème : dans cette hypothèse, le juge devra communiquer les éléments nouveaux à l'autre partie et ne pourra pas laisser que quelques heures à l'autre partie. Dans cette hypothèse de production des mémoires au dernier moment, le juge devra déplacer la date de clôture de l’instruction. → Ces formules ne sont jamais imparables.

Section 3 : Les instruments dont dispose le juge pour renforcer l’efficacité de l’instruction

§ 1. L’interdiction d’invoquer des moyens nouveaux